Jean-Paul Jérôme. Les abstractions lyriques

Commissaire : Constance Naubert-Riser

Du 5 octobre 2019 au 5 janvier 2020

À propos —

Jean-Paul Jérôme a signé le Manifeste des Plasticiens en 1955 aux côtés de Louis Belzile, Fernand Toupin et Jauran (Rodolphe de Repentigny). Il est considéré comme une figure centrale de l’abstraction au Québec de la seconde moitié du 20e siècle.

La carrière de Jean-Paul Jérôme se caractérise par son engagement envers l’abstraction géométrique et le hard-edge. L’exposition Les abstractions lyriques présentée par le MAJ s’attarde toutefois sur une parenthèse gestuelle fascinante de la carrière de l’artiste. Elle réunit une série d’encres sur papier exceptionnelles datées de 1969-1970.

Les dessins libres et éclatants de Jérôme se reçoivent comme une musique, un hymne à la joie. Fortes de cette rigueur dans la structure qui caractérise le travail de Jérôme et qui harmonise ici le désordre apparent, ces œuvres traduisent surtout un évident plaisir de peindre.

 


Image à la une

© Jean-Paul Jérôme, Sans titre, 1969, 66 x 101,6 cm, encre sur papier japon. Collection Robert Jérôme.

 

 

Biographie —

Né le 18 février 1928 à Montréal, Jean-Paul Jérôme est décédé le 14 août 2004. Il étudie à l’École des beaux-arts de Montréal de 1945 à 1952, puis il apprend les techniques de la fresque avec Stanley Cosgrove. Il est un des signataires du Manifeste des plasticiens (1955) aux côtés de Rodolphe de Repentigny (Jauran), Louis Belzile et Fernand Toupin. À Paris, entre 1956 et 1958, il côtoie les artistes Giacometti, Vasarely, Hans Hartung et Martin Barré. À son retour, il enseignera à l’École des beaux-arts de Montréal, puis à Sorel, jusqu’en 1973. Jean-Paul Jérôme compte à son actif plus d’une centaine d’expositions, tant individuelles que collectives, dans des galeries et des musées disséminés aux quatre coins du pays. Ses œuvres font également partie de nombreuses collections publiques et privées du Canada, tandis que tout son œuvre et les différentes étapes de son cheminement ont donné lieu à plusieurs publications.

Source : Galerie Simon Blais

 

« Toute ma vie, j’ai aimé la pureté de la forme, la résonnance de la couleur ».

Jean-Paul Jérôme

 


 

Mot de la commissaire —

Jean-Paul Jérôme est cosignataire en 1955 du premier Manifeste des Plasticiens avec Louis Belzile, Fernand Toupin et Rodolphe de Repentigny (Jauran). Les Plasticiens avaient fait une entrée remarquée sur la scène artistique montréalaise en se dissociant nettement des Automatistes, toujours prédominants. Les Plasticiens préconisent une peinture non figurative aux formes planes agencées de manière décentrée dans l’espace du tableau : une apologie de la rigueur qui favorise l’autonomie des moyens picturaux.

Produites entre 1969 et 1970 et jamais exposées durant sa longue carrière, les encres sur papier de Jean-Paul Jérôme apparaissent aujourd’hui comme une sorte de parenthèse dans une production essentiellement consacrée à l’abstraction géométrique.

Marqué par la peinture française des années 1950 lors d’un séjour à Paris de 1956 à 1958, Jérôme poursuit son exploration des nombreuses possibilités offertes par la peinture abstraite. Durant les années 1960, il entreprend un véritable dialogue avec l’œuvre plus gestuelle de Hans Hartung, puis explore de manière personnelle les ressources de l’art optique, nouvelle tendance internationale. Dans le contexte de son évolution, la production soudaine de ces encres en 1969 constitue donc une rupture, un saut dans l’inconnu.

Dans un premier temps, de petits carnets de dessin lui servent à se faire la main. Quelques coups de pinceau rythmés animent l’espace de chacune des pages. Jérôme adopte un nouveau médium plus fluide : l’encre de Chine Palen’s, qui se vend maintenant en flacons de différentes couleurs, vives et très lumineuses. Son rapport à l’espace de l’œuvre se transforme alors radicalement.

Séduit par la texture du papier japon, il pose les feuilles sur le sol de son atelier. Muni d’un pinceau large et d’un manche à rallonge, l’artiste travaille debout, ce qui lui permet d’augmenter l’amplitude du geste et la largeur des traces enchevêtrées. Des gouttes de couleurs sans doute projetées au hasard rappellent la technique du « dripping » mise au point par Jackson Pollock en 1947 pour exprimer son ardeur de peindre, une ferveur que l’on retrouve dans la personnalité forte et singulière de Jérôme.